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Le mardi 7 décembre, en avant-première de la représentation d’HANNIBAL, pièce de l’allemand Christian Dietrich GRABBE (1801/1836) dans une mise en scène de Bernard Sobel - représentation programmée par le CDN en collaboration avec l’ATAO, notre président Alain MALISSARD a tenu à raviver nos souvenirs de l’Antiquité dans une conférence intitulée
Le mardi 7 décembre, en avant-première de la représentation d’HANNIBAL, pièce de l’allemand Christian Dietrich GRABBE (1801/1836) dans une mise en scène de Bernard Sobel - représentation programmée par le CDN en collaboration avec l’ATAO, notre président Alain MALISSARD a tenu à raviver nos souvenirs de l’Antiquité dans une conférence intitulée
Hannibal contre Carthage ?
dont le titre, malgré le point d’interrogation, était pour le moins provocateur.
Il faut avouer que tout le monde avait peu ou prou mésestimé la
rivalité entre deux personnages influents - Hannibal et Hannon, entre
deux grandes familles de la cité fondée, selon la légende, par Didon.
Cette rivalité constitue la trame de la pièce de Grabbe, nettement plus
centrée sur les effets dramatiques que sur la vérité historique -
parfois même un peu malmenée.
Alain Malissard - que Jean NIVET a présenté en déclarant que ”rien de
ce qui était romain ne lui était étranger” - a tout d’abord évoqué la
situation à Carthage au sortir de la Première Guerre Punique : dans
cette cité-état, le pouvoir est disputé entre deux clans dont le plus
connu est celui des Barca. Le chef de clan Hamilcar Barca a d’un
premier mariage trois filles : la première épouse Bomilcar, la 2e Hasdrubal
le Beau, la 3e gagne la célébrité littéraire (c’est Salambô) et symétriquement d’un second mariage trois fils : Hannibal, c-à-d. le
favori de Baal, Hasdrubal II et Magon, tous les trois partisans
d’arrêter au plus vite l’expansion romaine. En face de ces “faucons”,
les membres du clan Hannon font figure de “colombes”; ces oligarques de
vieille souche, conservateurs, grands propriétaires (comme d’ailleurs
les Barca) veulent négocier une paix équitable et surtout étendre
leur hégémonie sur l’Africa (c-à-d. le Maghreb actuel). En -241, après la
bataille navale des Îles Aegades remportée par les Romains, Carthage
demande la paix qu’Hamilcar négocie contraint et forcé. Comme dit si
bien l’exemple de grammaire inspiré de Tite-Live “Sicilia amissa angebat
Hamilcarem” (la perte de la Sicile angoissait Hamilcar). Mais le
général carthaginois a d’autres soucis: il est obligé de réprimer sur
place la révolte des mercenaires en menant pendant 5 ans la “Guerre
inexpiable” ; il ne peut empêcher la conquête de la Sardaigne par Rome à
partir de -239. Cependant les Barcides restent en position de force. Le
Sénat carthaginois, soucieux de chercher une autre zone d’influence,
confie à Hamilcar le soin de conquérir l’Espagne du sud afin d’exploiter
les mines d’or (pour payer le tribut à Rome) Ce dernier s’y installe de
-237 à -228, date de sa mort ; c’est son gendre Hasdrubal dit le Beau
qui lui succède et fonde Carthago nova, autrement dit Carthagène, juste
avant d’être assassiné. C’est alors qu’Hannibal entre en scène,
plébiscité par l’armée ; il a à peine 25 ans, la haine de Rome chevillée
au corps et un charisme hors du commun. La prise de Sagonte, l’alliée de
Rome, va le consacrer comme chef de guerre et comme stratège
incomparable.
Cet événement de l’année -218 marque le début de la Seconde Guerre Punique, que les historiens appellent la “Guerre d’Hannibal”. Les budistes - dont la plupart avaient suivi à l’UTL le cours d’histoire romaine d’Alain Malissard - ont eu plaisir à écouter le récit de cette campagne militaire célèbre qui a mené les troupes carthaginoises et les cavaliers numides, accompagnés de 37 éléphants, depuis les rivages ibères jusqu’au fond de l’Apulie. Une campagne dont les batailles désignent à chaque fois la déroute des armées romaines : Le Tessin, La Trébie, Trasimène, Cannes. Le “chef borgne” est aux portes de Rome, mais, selon le mot trop connu de Maharbal, il ne sait pas profiter de la victoire. Les “délices de Capoue” marquent le tournant de la guerre : pendant que les troupes d’Hannibal s’enlisent en Campanie, celles d’Hasdrubal envoyées en renfort se font massacrer sur les bords du Métaure, le consul Marcellus prend Syracuse, libère la Sicile et les légions d’Espagne sous la conduite de Publius Scipion, après avoir regagné le terrain perdu, vont porter la guerre sur le sol punique. Hannibal, rappelé d’urgence ne peut que s’incliner à Zama en -202. Le jeune proconsul, auquel s’est rallié le roi numide Massinissa, a porté un coup fatal à Carthage, affirmé l’hégémonie de Rome sur la Méditerranée et gagné son surnom d’Africain.
A. Malissard
nous invite alors à examiner de plus près cette période, pendant
laquelle les Barcides toujours combatifs se sont opposés au clan Hannon,
en comparant avec la situation à Rome, où les Aemilii et les Cornelii
(autrement dit le cercle des Scipion) bellicistes et soutenus par le
peuple s’affrontent aux Fabii fervents adeptes de la négociation. A
Carthage, la rivalité entre les deux factions est lourde de
conséquences : ainsi, pendant le siège de Sagonte (en -218) après l’envoi
d’émissaires romains demandant l’arrêt du blocus en vue d’un traité,
Hannon manifeste son appui aux Romains en critiquant ouvertement Hannibal ; quand Magon profitant du succès de Cannes, en -216, vient
demander de l’aide, il essuie d’abord un refus, puis obtient satisfaction, mais trop tard et en pure perte ; lorsqu’Hannibal sera
rappelé dans sa patrie en -203, il avouera “être vaincu, non par les
Romains, mais par la malveillance du Sénat carthaginois”. Après la
défaite de Zama, c’est Hannon qui négocie la paix avec des conditions
désastreuses qui placent Carthage sous tutelle avec un tribut énorme de
10 000 talents, soit 50 millions de francs-or. Cependant Hannibal,
soutenu par Scipion, garde une certaine influence ; élu suffète
(l’équivalent du consul) il cherche à imposer une réforme financière
égalitaire, au grand dam de la classe dominante carthaginoise qui serait
prête à le livrer aux Romains. Il préfère s’exiler chez Antiochus III
de Syrie, puis chez Prusias Ier de Bithynie, où il s’empoisonne pour ne
pas tomber aux mains du légat romain Flamininus. C’est la fin de
l’aventure : le parti des Hannon a gagné contre les Barca, dont le nom
phénicien signifiait, dit-on, à la fois : “éclair” et “chance” (cf. la
baraka)
Au
moment de conclure, A. Malissard nous invite à réfléchir sur le destin
de ce capitaine hors normes : est-ce un héros désintéressé en lutte
contre le ”lobby” des marchands ? s’agit-il du conflit d’un chef
ambitieux d’une part et des oligarques médiocres de l’autre? On peut
aussi se demander quel aurait été le sort de Carthage si celle-ci avait
toujours écouté les Hannon. Le changement aurait-il été si grand ? En
effet, après Zama, Carthage a vite retrouvé la prospérité, au point de
proposer à Rome en -191 de payer son tribut en une seule fois et même de
continuer à lui fournir des vivres, comme au bon temps des échanges
commerciaux. La paix aurait-elle été alors possible ? Les Romains qui
avaient vécu la plus belle peur de leur histoire avec cette rumeur :
“Hannibal ad portas !” n’imaginaient pas le renouveau de cette cité
rivale. La Troisième Guerre Punique était inévitable, et martelée par le
célèbre “Carthago delenda est” du vieux Caton. Rien ne pouvait plus
arrêter l’expansion romaine. En revanche, aucun vainqueur romain, même Jules César, n'a égalé la gloire du grand vaincu de Carthage.
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- Hannibal sur le site du CDN Orléans/Loiret/Centre,
- Hannibal sur le site de l'ATAO,
- Hannibal sur le site du théâtre de Gennevilliers.
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